Jean-Pierre Chevènement, invité de LCI

Chevènement : "on a détruit l'école de l'intérieur"


samedi 20 juin 2009

Aubrives : quelques projets bienvenus, mais surtout une dérive autoritaire confirmée


1968, quelle année ! Pour moi, il est impossible de l’oublier étant donné que c’est celle de ma naissance. Pour beaucoup d’autres, c’est l’année qui a vu un grand élan de contestation paralyser la France pour demander plus de libertés, des conditions de travail plus humaines et une modernisation de la société. Pendant ces évènements, une jeunesse en quête de reconnaissance a pris les murs comme support pour faire connaître ses revendications et sa façon de pensée. Parmi les multiples slogans qu’on a pu y relever, un des plus connus est "la culture c’est comme la confiture, moins on en a plus on l’étale". C’est certainement ce qui a poussé Gilbert Leclercq, maire de la commune d’Aubrives, lors de la dernière réunion du Conseil municipal qui s’est tenue le 17 juin, à faire appel à Montaigne pour refuser d’inscrire les observations que j’émettais sur le compte rendu de la précédente réunion du Conseil municipal relatif au budget de la commune. Plutôt que d’accepter de relater le contenu réel des débats, il a préféré se cacher courageusement derrière les qualités techniques du receveur municipal qui s’était contenté de présenter et d’expliquer le budget sans prendre part aux délibérations (un conseiller technique n’est pas un élu du peuple et n’a donc pas voix au chapitre pour la prise des décisions !) et il a fièrement récité la citation qu’il venait d’apprendre pour la circonstance : "l’obstination et l’ardeur d’opinion est la plus sûre preuve de bêtise". La veille de la commémoration de l’appel à la résistance du général De Gaulle, démonstration par excellence d’obstination et d’ardeur d’opinion, il fallait oser le faire. Il l’a fait ! Heureusement que le ridicule ne tue pas, sinon il y aurait eu une place en moins dans le cimetière.

Le 1er magistrat ayant d’emblée affiché son refus de prendre en compte les avis divergents, la séance s’est tenue dans une ambiance rappelant celle des républiques bananières. L’autocrate de service, puisqu’il faut bien appeler les choses (oups, je voulais dire les personnes) par leurs noms, a alors pu faire une démonstration de toutes les caractéristiques propres à ces sinistres personnages. Comme tout autocrate qui se respecte, il s’est donc efforcé de faire taire ses opposants en les moquant, en leur refusant la parole, en ne répondant pas à leurs questions, voire en se montrant blessant à leur égard ce qui a très vite entraîné le départ d’un d’entre eux afin de montrer qu’un tel comportement n’est pas acceptable dans la République française. En bon autocrate, il s’est aussi efforcé de contrôler les organisations qui échappent à son pouvoir : ainsi, lorsque l’Amicale des chasseurs d’Aubrives a demandé de pouvoir faire passer le nombre de ses fusils de 20 à 23, il s’est immiscé dans la gestion de cette association en exigeant que les 3 fusils supplémentaires soient affectés conformément à ses souhaits, ce qui a provoqué une légitime poussée d’adrénaline chez le représentant des chasseurs qui était présent ; dans le même ordre d’idée, il a soutenu la contestation par le très libéral et néanmoins mauvais perdant Fabien Prignon de mon élection en qualité de Président du Comité des Anciens d’Aubrives, n’hésitant pas à recourir aux frais de la collectivité aux services d’un avocat pour intervenir dans un litige d’ordre privé, ce qui est pour le moins une gestion douteuse des deniers publics.

Surtout, comme tout autocrate déjà bien installé dans cette dérive comportementale, il a pris les décisions nécessaires pour que son palais présidentiel (re-oups, je voulais dire la mairie, celle qu’en d’autres temps on appelait la maison du peuple) impressionne de l’extérieur ses visiteurs ainsi que ses sujets (décidément, avec l’âge, j’ai les doigts qui tremblent et qui n’arrivent plus sur les bonnes touches : je voulais écrire ses concitoyens) et soit doté des équipements les plus modernes : ainsi, il a obtenu que soient affectés 12.062,86 euros au ravalement de la façade du bâtiment, 7.388,89 euros à la réfection de la toiture et 19.354,05 euros au remplacement des menuiseries ; à cela s’ajoutent les achats d’un photocopieur couleur dont l’usage s’annonce très modéré pour la bagatelle de 9.000 euros, d’un vidéo projecteur avec écran qui servira encore moins pour 2.768 euros et d’un appareil photo numérique (vous savez, ces appareils modernes qu’on trouve dans le commerce à environ 150 euros) pour 733 euros. Au total, cela représente donc 51.306,80 euros qui s’ajoutent bien sûr aux 30.580,24 euros déjà dépensés en un an pour l’amélioration du cadre de "travail" de l’exécutif communal (17.162,60 euros pour la modernisation du réseau informatique, 3.709,99 euros pour la pose d’un enrobé devant la mairie, 1.439,70 euros pour la réfection d’un bureau au 1er étage, 4.062,81 euros pour le changement des luminaires des bureaux et 4.205,14 euros pour la modernisation de l’installation téléphonique). Une jolie petite somme dont les administrés n’auront que très peu l’usage ! Enfin, comme tout autocrate averti, il n’a pas pu s’empêcher de tomber dans la mégalomanie en faisant apposer de grands panneaux annonçant l’ouverture d’un lotissement de 17 parcelles alors que la discussion a révélé que le lotisseur n’en était qu’au stade du dépôt de permis de lotir auprès de la DDE et que ce permis serait découpé en 3 tranches (d’abord 6 parcelles, puis 8 et enfin 3).

Heureusement, tout n’a pas été noir. La séance a permis de reporter la décision d’acheter la petite parcelle en face du cimetière comprenant un calvaire après mes explications sur l’illégalité que constituerait l’entretien par la commune de ce calvaire (n’en déplaise à certains, la loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat est toujours en vigueur !). Elle a aussi abouti à l’adoption d’un règlement pour l’utilisation du Foyer pour tous qui constitue un compromis acceptable entre la mairie et les riverains et qui permettra la tenue de manifestations à Aubrives. Dans le même ordre d’idée, elle a également permis d’engager la procédure qui permettra la réouverture au public de la Maison des Associations après la réalisation des travaux de mise en conformité aux normes de sécurité. Surtout, il a été décidé pendant cette séance d’installer, enfin, une aire de jeux pour les enfants derrière l’accueil périscolaire : d’un coût de 26.506 euros (chiffre intéressant à comparer avec celui des travaux divers réalisés à la mairie !), elle devrait être opérationnelle à la rentrée scolaire avec, à ma demande, l’installation autour d’une enceinte grillagée pour assurer au maximum la sécurité des enfants. La séance a donc été agitée, mais pas totalement inutile pour les Aubrivois(es), ce qui est de loin l’essentiel. Cependant, elle incite à faire preuve de beaucoup de vigilance face à la dérive autocratique désormais confirmée du premier magistrat auquel il faudra remettre rapidement les pieds sur terre.
LB

3 commentaires:

vigie08 a dit…

l'an dernier c'étais le champagne et les sous en fin de moi, maintenant c'est leur confort à la mairie qui passe avant tout le reste. ou est -ce que ça va s'arreter? ils vont quand meme pas transformer la place debette en place rouge

Anonyme a dit…

Un tel prurit autoritaire serait réjouissant s'il n'y avait pas des citoyens ordinaires pour payer les pots cassés... ou bus...
Par ailleurs, je sais bien qu'il ne faut pas tirer sur les ambulances, mêmes municipales, mais enfin, après consultation du site de la mairie, j'ai découvert qu'Aubrives était doté d'un équipement culturel unique en France : la Bibliothèque communale départementale. A ne pas confondre avec la Bibliothèque centre de documentation, qui a le mérite d'exister.
D'une façon plus générale, n'y aurait-il pas d'autres équipements à moderniser à Aubrives ( en plus du palais municipal, bien sûr ) ?

titi a dit…

C'est sûr que faire passer la modernisation d'une mairie avant la construction d'une aire de jeu qui coute 3 fois poins cher, c'est un choix politique. Si c'est celui de la majorité des habitants, pourquoi pas. Mais si c'est seulement celui de quelques élus, alors la c'est beaucoup plus grave. Les élus avant le peuple, c'est tout un programme