Jean-Pierre Chevènement, invité de LCI

Chevènement : "on a détruit l'école de l'intérieur"


mercredi 22 avril 2009

Givet : dans le port, tout est bon !


Sans tomber dans la nostalgie, il faut bien reconnaître qu'au début des années 1960, Givet c'était quelque chose. Choisie en 1962 pour accueillir le 1er Centre d'Entraînement Commando de toute la France, la cité de Méhul a eu l'honneur de recevoir l'année suivante le général De Gaulle, alors Président de la République, qui a prononcé un discours qui sert encore de référence à un grand nombre de nos décideurs locaux et départementaux (ah, les fameuses "Ardennes vertes"). Puis, en 1964, avec 1.800.000 tonnes de trafic et 120 salariés, son port se hissait à la 1ère marche des ports fluviaux français. Une époque "bénie" dont beaucoup se rappellent, qui a toutefois été suivie par un lent mais continu déclin dont le port est un excellent révélateur. Après avoir connu son dernier déchargement de charbon en 1979, il a vu disparaître son importante activité d'importation de voitures en 1992. Ensuite, son principal utilisateur, la Sanara, a déposé son bilan et Dame Nature, par l'intermédiaire des 2 terribles inondations de 1993 et 1995, lui a porté le coup de grâce.
L'implacable logique économique a alors conduit à la mise en liquidation judiciaire du port, dont tout laissait à penser qu'il terminerait en friche industrielle. Heureusement, la CCI, animée par un souci d'aménagement du territoire, est intervenue et a récupéré en 1995 de l'Etat la concession du site en contrepartie de l'engagement d'assurer son exploitation. Soyons honnêtes, le redémarrage de l'activité a commencé timidement avec un trafic d'à peine 150.000 tonnes. Mais les besoins croissants de ses 3 principaux utilisateurs (la carrière des Pierres Bleues, Tréfimétaux et Champagne Céréales) ont amené la CCI à réaliser, dans le cadre du Contrat de projets Etat-Région 2000-2006, avec l'appui de l'Union Européenne et des Voies navigables de France, un investissement de 4,5 millions d'euro, afin notamment d'approfondir l'écluse des 4 cheminées pour ouvrir le port, jusqu'alors accessible en venant de la Belgique aux seules péniches à gabarit de 1.100 tonnes, à celles de 1.350 tonnes. Parallèlement, la Communauté de communes Ardenne Rives de Meuse a acheté une grue et l'a mise à disposition de l'exploitant, puis elle a profité de l'opportunité offerte par l'ouverture de l'ascenseur à bateaux belge de Strépy-Thieux pour acquérir 2 bâteaux d'occasion (les bien nommés Ardenne et Rives de Meuse) afin de relancer le transport par convoi à gabarit moyen jusqu'en région parisienne. Le résultat ne s'est pas fait attendre : les activités se sont diversifiées (le bois, la fonte et le sel de déneigement ont fait leur apparition, ainsi que l'hivernage des bateaux de plaisance) et son trafic a explosé à partir de 2000 au point de dépasser largement les 400.000 tonnes annuelles.
Une belle renaissance donc pour cette infrastructure de 3 darses et de 1.400 mètres de quai, qui ne devrait pas s'arrêter là puisque dans le cadre du contrat de projets Etat-Région 2007-2013, du contrat de développement économique des Ardennes et du contrat de redynamisation de site de défense, un investissement global de 9,2 millions d'euro HT est prévu d'ici 2012 pour élargir la porte de garde (ce qui permettrait aux péniches de 1.350 tonnes et aux gros bateaux de touristes d'accéder à la ville de Givet et à la carrière des Pierres Bleues), aménager un avant-port aux 3 Fontaines (ce qui permettrait d'exporter les granulats sans faire passer une noria de camions à travers la ville de Givet et d'augmenter les réserves foncières de la zone portuaire qui se limitent à 35 hectares) et mettre en place une plate-forme tri modale eau-rail-route pour les conteneurs en réactivant les 650 mètres de rail jusqu'au passage à niveau de Mon Bijou et en reliant le port au Parc d'activités communautaire afin de permettre l'implantation d'entreprises s'approvisionnant par péniche mais dont le process n'implique pas une installation en bordure de quai. Pour sa part, La Communauté de communes accompagnera cette modernisation comme le montre l'achat d'une 2ème grue pour la bagatelle de 420.000 euro.
Ces aménagements, ainsi que les facilités offertes par la création de la zone franche Ardennes, n'ont pas échappé à certains industriels : ainsi, après le constructeur liégeois de trimarans Aerofleet, l'entreprise BST (recyclage de métaux ferreux et non ferreux) et Gema (importation de magnésie pour les aciéries) viennent de s'installer sur la zone portuaire. De petits employeurs, avec à peine 25 salariés à eux 3, diront les grincheux! Mais pour le MRC 08, les petits ruisseaux font les grandes rivières et l'attention dont fait l'objet le port de Givet doit être soutenue, d'abord parce qu'elle fournit des emplois adaptés à la main d'oeuvre locale, ensuite parce qu'elle réduit la pollution routière et le risque d'accident et surtout parce qu'elle ouvre une perspective d'avenir très prometteuse. Attention toutefois à un danger : la concurrence du 2ème port champardennais de Nogent sur Seine, qui a bénéficié ces dernières années d'une mise à gabarit à 1.000 tonnes et de l'installation d'un terminal conteneurs, et auquel la Région prévoit de consacrer 9 millions d'euro afin d'élargir la Seine pour permettre le passage de convois tractés qui pourront atteindre les 3.000 tonnes.

3 commentaires:

Ophélie a dit…

On dirait que de temps en temps, les dirigeants de la Communauté de communes sont assez intelligents pour savoir investir dans quelque chose d'utile et de bon pour l'avenir! "Et la lumière fût" malheureusement jamais pour très longtemps...

Guillaume Sarnelli a dit…

En ces temps difficiles, on peut voir dans cette renaissance timorée un espoir... Ou juste une lueur dans la nuit ?

Vigilant pour l'avenir de la Pointe a dit…

Pour répondre à la question, il faudrait étudier plus en détail le trafic des arrières-ports d'Anvers et de Rotterdam afin de voir s'ils sont déjà en situation de saturation ou pas.
A priori, ce n'est pas le cas. Givet a donc de l'avenir, mais pas dans l'immédiat. Ceci étant, c'est justement pour cela qu'il faut préparer cet avenir dès maintenant. C'est ce que semblent faire toutes les collectivités locales et même l'Etat. Tant mieux!

Attention toutefois à ne pas trop attendre de cette renaissance du port. Elle créera des emplois adaptés à la main d'oeuvre locale, ce qui est bien, mais elle ne remplacera pas tous les emplois perdus depuis de nombreuses années.