Jean-Pierre Chevènement, invité de LCI

Chevènement : "on a détruit l'école de l'intérieur"


samedi 25 avril 2009

Relais Services Publics : une nouveauté pour le meilleur ou pour le pire ?


Dans un monde où la rentabilité est devenue la boussole de toute action, les services publics à la française ont du plomb dans l'aile. Attaqués par la Commission européenne qui souhaite que ses activités les plus rentables soient ouvertes à la concurrence, affaiblis par les gouvernements successifs qui s'efforcent par tous les moyens d'en réduire les coûts, décriés auprès de la population à laquelle on fait croire que ses agents sont des nantis payés à ne rien faire, ils reculent partout. Dans les zones rurales, c'est encore pire : ils disparaissent purement et simplement! L'inégalité de fait dont souffrent traditionnellement les habitants des campagnes par rapport aux citadins s'est ainsi encore agrandie, au point d'amener le gouvernement à mettre en place le 17 février 2005 une Conférence nationale sur les services publics ruraux. Constatant le foisonnement d'initiatives locales pour faire face à ce repli des services publics (maison des services publics, espace rural emploi-formation, point information jeunesse, ...), elle a proposé d'unifier les services d'accueil par l'institution d'un label unique. Cette idée a été reprise par la Charte sur l'organisation des services publics en milieu rural signée le 23 juin 2006 par le 1er ministre, l'Association des Maires de France, 15 grands opérateurs de services (EDF, la Poste, GDF, SNCF, ...) et des organismes de protection sociale (ANPE, UNEDIC, CNAF, CNAM, CNAV, ...) et elle a abouti à la circulaire du 02 août 2006 invitant les préfets à labelliser, sous le nom de Relais Services Publics, des structures d'accueil polyvalent du public.

Sans forme juridique imposée, les Relais Services Publics peuvent être portés entre autres par une mairie, une intercommunalité, voire une association. Ce sont des structures légères offrant la possibilité d'être accueilli par un ou deux agents bien au fait de l'organisation administrative générale, d'obtenir des informations et d'effectuer des démarches administratives relevant de plusieurs administrations ou organismes publics grâce à l'utilisation d'Internet et des facilités offertes par les nouvelles technologies de la communication. Opérant essentiellement dans le domaine de l'emploi et des prestations sociales, ils répondent à une charte nationale de qualité qui garantit le niveau du service rendu et ils sont présentés comme LE moyen permettant de rendre un service de proximité et de qualité à tous les usagers en renforçant le maillage du territoire, notamment en milieu rural. Une véritable panacée donc, dont l'Etat attend qu'elle donne naissance à 1500 petits en 3 ans, et qui a déjà abouti à 109 créations au début de cette année ... dont 12 dans les Ardennes qui est ainsi le département qui compte aujourd'hui le plus de Relais Services Publics : parmi eux, 7 sont portés par 4 Communautés de communes de l'ouest du département, dont le très original Bus de Pays qui parcourt les Crêtes pré-ardennaises pour aller à la rencontre de tous ses habitants, et 5 par le Pays des Vallées de Meuse et Semoy qui a mis à profit le réseau des centres sociaux de ce territoire fortement urbanisé.

Que faut-il penser de cette nouveauté ? Pour le MRC 08, deux choses! La première est qu'il s'agit d'une excellente innovation qui permet aux populations éloignées des grandes villes d'accéder aux services publics sans avoir à trop se déplacer, ce qui représente à la fois un gain de temps, d'argent et de pollution. En plus, elle apporte une aide incontestable aux personnes âgées en les accompagnant dans des démarches administratives qui semblaient à certaines un parcours du combattant insurmontable. Quant à la deuxième, c'est que cette invention a priori bonne porte en germe plusieurs dangers auxquels il convient d'être dès à présent attentif : le 1er est que si l'investissement d'environ 50.000 euro nécessité par la mise en place d'un Relais Services Publics est pris en charge par l'Etat et les organismes publics, il n'en est pas de même du fonctionnement estimé également à 50.000 euro par an qui n'est assuré par l'Etat qu'à hauteur de 20 à 40 % et pour une partie du solde par les organismes sociaux ; le 2ème est que le succès souhaitable et souhaité des Relais Services Publics conduira inévitablement à une diminution de l'activité des antennes des services publics et des organismes sociaux dans les départements, et par ricochet à une baisse de leurs effectifs bénéficiant de contrats de travail sécurisés au profit "d'agents d'accueil" certes plus proches de la population mais recrutés sur des contrats plus précaires ; surtout le 3ème danger est que la diminution de l'activité des antennes traditionnelles des services publics et des organismes sociaux conduise à la fermeture d'un certain nombre d'entre elles au profit des centres plus importants situés dans les chefs-lieux de département, voire de région. Le risque d'un transfert de charges accompagné d'une précarisation et d'une réduction de la voilure des services publics est bel et bien présent. Attention donc à ce que cette innovation intéressante ne se transforme en machine à malheur ...

2 commentaires:

titi a dit…

Si je me souviens bien , le candidat du MRC aux cantonales à Givet avait proposé dans son programme la mise en place de plusieurs établissements de ce genre. Aujourd'hui, le canton en a un à Givet et un à Vireux molhain. Vous devriez donc être content, mais vous semblez assez réservé. étonnant non ?

Vigilant pour l'avenir de la Pointe a dit…

Pas si étonnant que cela. Sur le fonds, nous sommes pour la défense des services publics et pour tout ce qui peut les rapprocher des citoyens, de tous les citoyens. C'était la position défendue par notre candidat l'an dernier et nous ne la renierons pas.

Mais depuis, Nicolas Sarkozy et son rouleau compresseur de la RGPP sont passés par là et il nous semble qu'il faut analyser toute initiative du gouvernement à l'aune de cette nouvelle donne. Les Relais Services Publics sont a priori une bonne chose et nous ne nous plaindrons pas d'en avoir 2 dans le canton. Mais, maintenant que l'on cerne mieux la logique qui guide la politique gouvernementale, nous pensons légitime de nous demander si derrière une bonne initiative, il n'y a pas en fait une entourloupe destinée à saper encore un peu plus les services publics.