Souvenez-vous de la mémorable journée du 18 décembre 2006! Lors d'un déplacement officiel dans notre département, le ministre candidat à la magistrature suprême, Nicolas Sarkozy, avait enflammé les 3.000 militants venus l'écouter au Parc des Expositions de Charleville-Mézières en prononçant son fameux discours sur "la France qui souffre". Considéré comme un tournant majeur de la campagne présidentielle, le lancement de ce slogan est pratiquement tout ce que les médias nationaux ont retenu de cette visite. Mais ce n'a pas été le cas de nos quelques médias départementaux et de certains connaisseurs des réalités économiques des Ardennes qui ont été plus sensibles à ces propos tenus l'après-midi dans les salons de la Préfecture par celui qui s'est efforcé d'apparaître moins comme le ministre de l'Intérieur que comme celui de l'aménagement du territoire : "l'un des points faibles des Ardennes tient à l'absence d'un pôle tertiaire important, notamment autour de la ville chef-lieu. Afin que l'Etat donne ici l'exemple, j'ai décidé, dans ce contexte, que l'agence nationale des titres sécurisés, établissement que le ministère de l'Intérieur s'apprête à créer, s'installera sur l'agglomération de Charleville-Mézières sur un site qui reste à trouver". Et d'ajouter pour le plus grand bonheur de l'auditoire que "cette agence représentera plusieurs dizaines d'emplois publics de haut niveau".
Le fer se battant en période électorale lorsqu'il est encore chaud, pour ne pas dire bouillant, la promesse a abouti dès le 24 février 2007 à la création officielle de l'ANTS dont la mission est d'organiser la conception, avant leur fabrication à l'Imprimerie Nationale de Douai, des 3 millions annuels de passeports électroniques ainsi que des futurs passeports biométriques, visas numériques, plaques d'immatriculation à vie, cartes nationales d'identité numérisées et cartes vitales sécurisées en attendant celle des cartes grises et des permis de conduire modernes. En avril, la nouvelle agence a commencé son activité avec une équipe de 9 ingénieurs dans des bureaux mis à sa disposition par la ville rue de l'église. Après plusieurs mois de recherche, elle a emménagé dans un bâtiment appartenant à la Poste-France Telecom acheté et reconfiguré par le Conseil général. Inauguré en décembre en grande pompe par la ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie, ces locaux financés de fait par les Ardennais eux-mêmes ont été présentés comme "devant être le 1er maillon d'un pôle tertiaire à Charleville-Mézières". Un projet toujours aussi ambitieux donc, qui a été heureusement confirmé en septembre 2008 par l'embauche, pour épauler les 19 hauts fonctionnaires ayant accepté de travailler dans les Ardennes moyennant une prime d'incitation de 9.200 euro (!), de 60 personnes auxquelles viendront s'ajouter à terme 40 autres pour atteindre l'effectif de croisière fixé à 118 salariés.
Comme tous ceux qui sont attachés au développement de notre département sur des bases permettant de marier intelligemment l'ancienne et la nouvelle économie, le MRC 08 se réjouit que le projet d'implantation de l'ANTS se soit transformé en réalité et qu'il ait permis de créer un nombre non négligeable d'emplois. Que l'Etat en soit félicité comme il le mérite! Cependant, qu'il soit aussi assuré que nous ne sommes pas dupes de son double jeu qui consiste à reprendre d'une main 2 à 3 fois plus que ce qu'il a donné d'une autre, comme le montre la récente carte judiciaire qui a fait disparaître un nombre important d'emplois tertiaires avec la fermeture des 3 tribunaux d'instance de Rocroi, Vouziers et Rethel, du greffe détaché de Fumay, du pôle de l'instruction et du tribunal de commerce de Charleville-Mézières ainsi que du tribunal des prud'hommes de Sedan ... ou encore la suppression en 2007 de 80 postes d'enseignants suivie en 2008 de 62 autres et très probablement de 71 supplémentaires en septembre 2009. Sans parler de la fermeture du Centre d'entraînement Commando de Givet qui fera passer à la trappe 160 emplois publics, lesquels, s'ils ne sont pas des emplois tertiaires, sont tout de même parfaitement révélateurs de l'attitude de ce Janus des temps modernes que l'on appelle l'Etat aménageur.
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